La marque du dragon by Johan Heliot

La marque du dragon by Johan Heliot

Auteur:Johan Heliot [Heliot, Johan]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse
Éditeur: Fleurus
Publié: 2015-10-27T16:00:00+00:00


6. Les yeux de la nuit

Tibor avait installé le campement à distance du village d’Arefu. À peine allongé, David s’était endormi comme une masse. La fatigue accumulée dans la journée l’avait terrassé. En temps normal, il aurait mieux résisté aux épreuves, mais le phénomène d’effacement qui se répandait à toutes les générations des Grendel commençait à le gagner. Certes, ses traits ne fondaient pas comme sur les portraits exposés au Manoir. Il se sentait toutefois terriblement affaibli, vidé de l’intérieur, son énergie naturelle aspirée par quelque créature affamée.

David dormit mal, d’un sommeil agité par les souvenirs de son arrivée. Loups, auberge, traque par les hommes de Radu : ce n’étaient pas des rêves mais une succession d’épisodes collés bout à bout, qui défilaient sous son crâne avec la précision d’une projection cinématographique. Il se réveilla l’esprit gourd, de mauvaise humeur. Ses membres étaient douloureux, le moindre geste lui coûtait, comme enfiler ses vêtements ou boucler sa ceinture. Avant même de songer à prendre contact avec James, l’adolescent observa sa ligne de vie. Elle était raccourcie environ de moitié. Les protections des Roms se contentaient de freiner la menace sans pouvoir l’interrompre. David la sentait rôder à proximité, prête à s’abattre sur lui à la moindre occasion. Il tenta de contacter le Manoir de Fer mais n’obtint que des grésillements.

Il rejoignit ensuite les Gitans occupés à faire leur toilette autour d’un chaudron empli de neige fondue sur les braises du feu de camp. On n’entendait aucun bruit en provenance du village, à croire qu’Arefu était inanimé, déserté par sa population. Ce n’était pas le cas, mais les villageois demeuraient calfeutrés derrière leurs lourdes portes de bois ferré. Des cadavres de corbeaux achevaient de pourrir sur la plupart des panneaux, un clou planté à l’extrémité de chaque aile dépliée. David remarqua qu’une chouette avait subi le même sort, ainsi qu’un chat noir éviscéré…

— On ne peut pas dire que les gens du coin aient le sens de l’accueil.

Tibor opina.

— Partout où l’on passe, c’est la même chose. Personne n’aime les nomades. En plus, ici, ils ont d’autres raisons de se méfier…

Un simple coup d’œil sur Poenari et sa tour sinistre suffisait à comprendre ce qui suscitait la méfiance des villageois. Dans la lumière du petit jour, guère plus qu’une nébulosité grisâtre, la forteresse de Drakula dévoilait certains détails passés inaperçus la veille au soir. Ainsi de rares fenêtres, plutôt des meurtrières, percées sur l’enceinte minérale, ou bien des créneaux massifs qui faisaient une couronne de pierre à son sommet. Rien n’indiquait que quiconque vivait là. Il était difficile de croire que le prince et sa jeune épouse avaient élu domicile en un pareil endroit. Le château ressemblait davantage à une créature titanesque qu’un sort aurait pétrifiée pour garder le col de Borgo jusqu’à la fin des temps.

Une fois tout le monde lavé et habillé, les chevaux bichonnés, on se remit en route. Tibor choisit d’entamer l’ascension par la face la plus aisée, où un chemin sinueux et étroit montait le long du piton rocheux.



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